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PREMIERES (Festival du Cinéma Américain ) - Page 8

  • "Meurtres à l'Empire State Building" de William Karel: un original et réjouissant hommage aux films noirs des années 40

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    Les producteurs du film et le réalisateur William Karel, hier, lors de l'avant-première au Casino.

    L’intérêt principal de « Meurtres à l’Empire State Building », film figurant dans la section Première et présenté au Casino hier après-midi, réside dans la sa forme, unique et particulièrement originale, et même audacieuse, s’inspirant de celle des films auxquels elle rend hommage (les films noirs des années 40), et mêlant astucieusement images d’archives de films de ces années-la et interviews de monstres sacrés du cinéma américain (Kirk Douglas, Cyd Charisse disparu récemment, Mickey Rooney, Ben Gazzara…), le tout donnant l’impression, grâce à un montage particulièrement travaillé et intelligemment ficelé et grâce à un scénario remarquable, de voir un documentaire sur Penny Baxter dont le film raconte le destin imaginaire (et qui prend les traits de Laurent Bacall), celle dont les témoins se souviennent, abattue par un tueur à gage soixante ans plus tôt sur l’ordre de son mari, un mafieux notoire. Jim (Kirk Douglas que l’on voit aussi bien dans des images de films dans lesquels il a tournés qu’aujourd’hui, se souvenant), le policier qui fut chargé de l’affaire raconte ainsi comment jeune policier chargé de faire tomber son mari, il était tombé amoureux d’elle et  n’avait pu empêcher son assassinat… un assassinat dont il ne s’est jamais remis et qu’il avait tenté d’enfouir dans les tréfonds de sa mémoire jusqu’à la réception d’une troublante cassette surgie du passé.

      Au-delà de la prouesse technique et scénaristique, « Meurtres à l’Empire State Building » est un film atypique particulièrement réjouissant pour le spectateur, et même ludique, celui-ci pouvant s’amuser à retrouver les titres des films dont les extraits servent pour constituer l’intrigue : une cinquantaine de films mythiques ont ainsi été utilisés. Des acteurs apparaissent ainsi dans une même intrigue alors que, parfois, certains d’entre eux, n’ont jamais joué ensemble : James Cagney, Humphrey Bogart, Lizbeth Scott, Richard Widmarck, Glenn Ford, Edward G.Robinson…

      « Meurtres à l’Empire State Building » aurait pu n’être qu’une bonne idée, et s’en contenter mais il joue savamment avec les clichés du film noir (femme fatale, brouillard, rues sombres… ) pour constituer une véritable intrigue policière, réellement captivante, malgré et grâce à son ton décalé, jouant avec nos références ( le mode narratif avec ces témoins contribuant à donner de la disparue un portrait magnétique et contradictoire s’inspirant de celui de « La Comtesse aux pieds nus », « Les Ensorcelés » ou encore « Citizen Kane »), ou même avec cette voix off typique des films noirs américains, avec cette sorte de détachement et de nonchalance qu’incarnait si bien le charismatique Humphrey Bogart (que l’on retrouve ainsi en ami de Jim-Kirk Douglas, et qui s’appelle ici Sam comme dans « Casablanca » dont on retrouve d’ailleurs une scène mythique).

       Quant au, le lieu l’Empire State Building, qui sert de cadre principal au film, il n’a évidemment pas été choisi par hasard : c’est le symbole du gigantisme américain mais aussi de sa fragilité, évoquant la perte des Twin Towers, et donc la force autant que la fragilité de l’Amérique.

     William Karel joue intelligemment avec les mythes que ce soit ceux du cinéma  ou même ceux de l’Amérique pour nous entraîner dans cette histoire jubilatoire, ludique, qui révèle et que révèle un magistral travail de montage et d’écriture.

     Un vrai coup de cœur que je vous recommande vivement !  (Il repasse ce dimanche, à 19H, au casino pour les festivaliers qui ne l’auraient pas vu hier.)

     Si vous aussi avez vu ce film, n’hésitez pas à laisser vos commentaires…

     Sandra.M

     

  • Les Premières du 34ème Festival du Cinéma Américain de Deauville 2008 (complément de programmation)

    affichedeauville2008.jpgDepuis la conférence de presse qui a eu lieu le 21 Juillet dernier à Deauville, la sélection des Premières s’est aujourd'hui enrichie de 4 nouveaux films :

    CHAOS THEORY (La théorie du chaos)  de Marcos Siega

    Avec Ryan Reynolds, Emily Mortimer, Stuart Townsend, Sarah Chalke, Mike Erwin

    Pitch: Frank Allen est un auteur à succès dont le quotidien est réglé au détail près. Un matin, sa femme, en voulant assouplir l’organisation de son mari, va semer le chaos dans sa vie bien ordonnée…

    MEURTRES À L’EMPIRE STATE BUILDING de William Karel

    Avec Kirk Douglas, Cyd Charisse, Ben Gazzara, Marsha Hunt, Mickey Rooney, Richard Erdman

    Pitch: Un hommage décalé aux films noirs américains et aux acteurs mythiques de l’âge d’or hollywoodien qui nous plonge dans les entrailles du New York sombre et fascinant des années 30 et 40, jouant allègrement avec les clichés du polar, où s’entrecroisent flics et gangsters, mafieux notoires et femmes fatales…

    SEX AND THE USA  de Jan Wellmann Première mondiale

    Avec Shayla Beesley, Jamie Perkins, Gwen Davis, Josh Fallon, Kyle Buckland

    Pitch: Audrey Shaw, une adolescente de treize ans, vient d’arriver au collège de Bellweather en Californie. Elle pense qu’elle ne s’y fera jamais jusqu’au jour où elle rencontre Krista Rich, la jolie fille populaire qu’elle aurait tant voulu être, en tous cas celle dont elle voudrait être proche ; elle ne sait pas très bien…

    THE YELLOW HANDKERCHIEF  de Udayan Prasad

    Avec William Hurt, Maria Bello, Kristen Stewart, Eddie Redmayne

    Pitch: Trois étrangers solitaires se retrouvent à traverser la Louisiane en voiture. Au cours de ce voyage, ils apprendront à mieux se connaître et à faire la paix avec eux-mêmes…

    Vous pouvez retrouver ma note consacrée aux autres films sélectionnés en Première en cliquant ici.

  • Les Premières du 34ème Festival du Cinéma Américain de Deauville

    Vous trouverez ci-dessous les pitchs des 14 films (sans compter les films d'ouverture et de clôture auxquels je consacrerai prochainement un article) projetés en Première de ce 34ème Festival du Cinéma Américain de Deauville avec notamment "L'échange" de Clint Eastwood, en compétition lors du dernier Festival de Cannes. Retrouvez ci-dessus, prochainement mon article consacré à ce film .

    APPALOOSA de Ed Harris

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    Avec Viggo Mortensen, Renée Zellweger, Jeremy Irons, Ed Harris

    Pitch: Etats-Unis, 19ème siècle. Virgil Cole est désigné comme le nouveau marshall d'une ville dirigée par Randall Bragg, propriétaire de ranch, qui sème la terreur. Ce dernier vient de tuer l'ancien marshall et le député de la ville. Arrêté par Cole et jugé, il est condamné à mort par pendaison, mais réussit à s'échapper au dernier moment. S'enchaîne alors une coursepoursuite entre les deux hommes.

    DAN IN REAL LIFE (Coup de foudre à Rhode Island) de Peter Hedges

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    Avec Juliette Binoche, Steve Carell, Dane Cook, Emily Blunt, Dianne Wiest

    Pitch: Dan, un père veuf et célibataire, est persuadé qu'il ne retrouvera jamais l'amour. Jusqu'au jour où il rencontre Marie dans une librairie et en tombe follement amoureux. Mais cette dernière se trouve être la petite amie de son frère…

    GET SMART (Max la Menace) de Peter Segal

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    Avec Steve Carell, Anne Hathaway, Alan Arkin, Dwayne Johnson, Terence Stamp, James Caan

    Pïtch: Après l’attaque du QG de l'agence de renseignement Contrôle, l'identité de ses agents est compromise et le Chef n'a d'autre choix que de promouvoir son analyste le plus zélé : Max. Bien que Max rêve depuis toujours d’assister le légendaire Superagent 23, le Chef lui choisit pour partenaire l'Agent 99, aussi belle qu'aguerrie, dont la couverture n'a jamais été compromise.

    HELLBOY II: THE GOLDEN ARMY (Hellboy II : Les légions d’or maudites) de Guillermo del Toro

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    avec Ron Perlman, Selma Blair, Doug Jones, Jeffrey Tambor, Luke Goss, John Hurt

    Pitch:Après qu’une ancienne trêve établie entre le genre humain et le royaume invisible des créatures fantastiques ait été rompue, l’Enfer sur Terre est prêt à émerger. Un chef impitoyable qui règne sur le royaume d’en dessous, renie ses origines et réveille une menace sans précédent : une armée de créatures que personne ne peut arrêter. Maintenant, il est temps pour Hellboy, le super héros le plus indestructible et le plus cornu de la planète, de combattre un dictateur sans pitié et ses légions.

    IDIOTS AND ANGELS (Des idiots et des anges) de Bill Plympton – Film d’animation

    Pitch: Angel est un homme égoïste et sans principes qui s’éveille un matin avec des ailes dans le dos. Il s’efforce de les dissimuler mais les autres clients du bar où il a ses habitudes vont finir par percer son secret…

    LAKEVIEW TERRACE de Neil La Bute

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    Avec Samuel L. Jackson, Patrick Wilson, Kerry Washington, Jay Hernandez

    Pitch: Le rêve d'un jeune couple venant d'emménager dans la maison idéale vire rapidement au cauchemar à cause d'un voisin raciste…

    LARS AND THE REAL GIRL (Une fiancée pas comme les autres) de Craig Gillespie

    Avec Ryan Gosling, Emily Mortimer, Paul Schneider, Kelli Garner, Patricia Clarkson

    Pitch: Timide et introverti, Lars vit seul dans le garage aménagé de son frère Gus et de sa bellesoeur Karin. Quand il leur annonce qu’il a enfin rencontré une jeune fille sur Internet et qu’elle va bientôt lui rendre visite, Gus et Karin sont soulagés et très impatients de faire sa connaissance. Leur surprise est grande lorsque Lars leur présente très officiellement Bianca, poupée en silicone grandeur nature qu’il considère comme une vraie femme…

    MARRIED LIFE de Ira Sachs

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    Avec Pierce Brosnan, Chris Cooper, Patricia Clarkson, Rachel McAdams

    Pitch: Harry aime tellement son épouse Pat qu’il est prêt à la tuer plutôt que de la faire souffrir en lui annonçant qu’il la quitte pour une autre. Harry vit actuellement le grand amour avec Kay, une femme beaucoup plus jeune que lui. Mais son meilleur ami Richard n’est pas insensible aux charmes de Kay…

    MIRACLE AT SANTA ANNA (Miracle à Santa Anna) de Spike Lee

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    Avec Derek Luke, John Turturro, Michael Ealy, Laz Alonso, Omar Benson Miller

    Pitch: Durant la Seconde Guerre mondiale, une escouade composée exclusivement de soldats Noirs américains est laissée dernière les lignes ennemies et trouve refuge dans un village isolé des montagnes toscanes.

    RECOUNT de Jay Roach

    Avec Kevin Spacey, Bob Balaban, Ed Begley Jr., Laura Dern, John Hurt, Denis Leary

    Pitch: Comme les deux candidats à l’élection présidentielle américaine de 2000 - George W. Bush et Al Gore - semblent arriver à égalité en Floride, la décision est prise de recompter les bulletins de vote. Alors que la Cour Suprême s’empare de l’affaire, le républicain James Baker et le démocrate Ron Klain vont tout faire pour gagner les faveurs du public.

    THE CHANGELING (L’échange) de Clint Eastwood

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    Avec Angelina Jolie, John Malkovich, Jeffrey Donovan, Michael Kelly, Jason Butler Harner, Devon Conti

    Pitch: Los Angeles, 1928. Un matin, Christine dit au revoir à son fils Walter et part au travail. Quand elle rentre à la maison, celui-ci a disparu. Une recherche effrénée s’ensuit et, quelques mois plus tard, un garçon de neuf ans affirmant être Walter lui est restitué. Christine le ramène chez elle mais au fond d’elle, elle sait qu’il n’est pas son fils…

    THE GIRL NEXT DOOR de Gregory Wilson

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    Avec Blythe Auffarth, Daniel Manche, Blanche Baker, Graham Patrick Martin

    Pitch:1958. Dans une banlieue paisible, deux soeurs sont placées chez leur tante après le décès de leurs parents. Cette dernière, mentalement instable, va s’occuper d’eux à sa manière ...

    THE LIFE BEFORE HER EYES (La vie devant ses yeux) de Vadim Perelman

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    Avec Uma Thurman, Evan Rachel Wood, Eva Amurri, Gabrielle Brennan

    Pitch: Diana, professeur de beaux-arts à l’université, mariée et mère d’une fille de huit ans, a tout pour être heureuse. Mais l’ombre d’une tragédie vécue lorsqu’elle était étudiante l’obsède encore. A l’époque, elle et son amie Maureen étaient ensemble lorsqu’un de leurs camarades armé a déclenché une fusillade dans leur école et fait de nombreux morts…

    THE WACKNESS de Jonathan Levine

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    Avec Sir Ben Kingsley, Josh Peck, Famke Janssen, Olivia Thirlby, Mary-Kate Olsen

    Pitch: New York, été 1994. Giuliani vient d’être élu et la ville vibre au son du Hip Hop. Les cours sont terminés mais Luc, le dealer d’herbe officiel du lycée, se sent hors-cadre : pas de potes, toujours puceau, des parents endettés et l’entrée à l’université dans deux mois. D’ou son idée d’échanger de l’herbe contre des séances de psychothérapie avec le docteur Squires qu’il vient de rencontrer.

  • « Gone baby gone » : le premier film de Ben Affleck-réalisateur en avant-première mondiale à Deauville

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    Une fois de plus cette année, Deauville a créé l’évènement en projetant le premier film réalisé par Ben Affleck « Gone baby gone » en avant-première mondiale. « Gone baby gone » est un film inspiré du roman éponyme de Denis Lehane, il  relate l’enquête après la disparition d’une petite fille de 4 ans dans une banlieue pauvre de Boston, plus exactement à Dorchester, le plus grand et le plus hétéroclite des quartiers de Boston, à travers le regard de deux jeunes détectives privés interprétés par Casey Affleck (qui prouve une nouvelle facette de son talent déjà éclatant dans  le film projeté avant-hier « L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford ») et Michelle Monaghan . Avec ce premier film Ben Affleck a choisi d’explorer les bas-fonds voire les tréfonds obscurs et secrets de ce quartier de Boston, avec ses visages patibulaires, marqués par la souffrance, la violence, l’aigreur. Surtout le désespoir. Mais il explore surtout les tréfonds de l’âme, de consciences confrontées à de cruels dilemmes, là où la frontière entre le bien et le mal, le crime et l’innocence est si étanche, là où le basculement de l’un à l’autre est si aisé, là où rien n’est noir ou blanc mais où tout est complexe à commencer par les sentiments humains et la morale. Comme un troublant écho aux deux films évoqués dans mon article d’hier, ce film démontre que « bien agir peut avoir des conséquences néfastes et que des personnes proches et intelligentes peuvent sortir différemment d’un dilemme moral » et qu’on peut commettre le mal pour obtenir le bien, ou sous prétexte d’obtenir le bien, qu’une bonne intention ou qu’une pseudo bonne intention peut se révéler nuisible. En résulte un film  âpre et angoissant, empreint de réalisme et de tension du début à la fin, à la réalisation très maîtrisée, particulièrement pour un premier film avec une distribution particulièrement réussie : Casey Affleck, Ed Harris, Morgan Freeman, Michelle Monaghan mais aussi des acteurs non professionnels. Un film avant tout intéressant pour son ambiguïté morale… Un premier film prometteur.





    L'équipe du film ovationnée à l'issue de la projection:


     

  • « Dans la vallée d’Elah » de Paul Haggis et « Grace is gone » de James C. Strouse : un cinéma en (mauvaise ?) prise avec l’actualité

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    27121f87b640e2b36a92e4495c08d3db.jpgChaque jour ou presque des images d’attentats suicides en Irak nous parviennent. Nous parviennent ou ne nous parviennent plus d’ailleurs car trop atroces pour sembler réelles elles créent parfois une distance, elles nous paraissent parfois chimériques et factices comme les images d’un blockbuster outrancier.  La réalité ressemble parfois dramatiquement à du mauvais cinéma. La difficulté mais aussi la nécessité pour le cinéma de s’en emparer est donc d’autant plus grande. Plusieurs films de ce festival ont ainsi pour cadre le conflit irakien notamment « Dans la vallée d’Elah » de Paul Haggis et « Grace is gone » de James C.Strouse. Le premier était particulièrement attendu, étant le seul oscarisé deux années de suite, pour « Million dollar baby » mais surtout « Collision » qui avait également remporté le grand prix à Deauville. Ce film portait d’ailleurs déjà sur les répercussions du 11 septembre 2001 et la paranoïa qui s’était alors emparée de l’Amérique. « Dans la vallée d’Elah » raconte la quête d’un père dont le fils, de retour d’Irak pour sa première permission, disparaît mystérieusement et est alors signalé comme déserteur.  Quête de son fils puis de la vérité une fois ce dernier retrouvé mort et atrocement mutilé. Ce père, un ancien membre de la police militaire est interprété par Tommy Lee Jones. Il sera aidé dans ses recherches par Emily Sanders (Charlize Theron), officier de police de la juridiction du Nouveau Mexique où le jeune soldat a été aperçu pour la dernière fois… Paul Haggis avait visiblement un désir profond et violent d’évoquer ce sujet, de lutter et se révolter à sa manière. C’est un peu comme si les émotions, probablement sincères, s’étaient bousculées dans son esprit mais qu’il n’était pas parvenu à les canaliser, paralysé par l’enjeu, dépassant soudain le cinéma, et nous jetant ainsi en pleine figure sa révolte comme un magma incontrôlable et chaotique. Le but est tellement ouvertement affiché par le cinéaste, les moyens sont tellement flagrants qu’ils en perdent presque leur force. Plutôt que de nous montrer les images insoutenables du journal télévisé,  Paul Haggis égrène les images de la guerre par petites touches, par le prisme d’un écran de téléphone avec lequel le jeune soldat avait filmé la guerre. Et puis l’horreur surgit brutalement, s’immisçant dans la réalité américaine apparemment si loin de ces images de guerre, d’un pays pourtant en guerre, si loin, là-bas de l’autre côté de l’écran de télévision et finalement donc si irréelles. La bonne idée est donc d’évoquer les conséquences de la guerre dans la société américaine, de la faire passer de la virtualité à la réalité : chaque américain peut alors s’identifier à ce père qui recherche son fils et le retrouve mutilé… davantage qu’à ces images de massacres pourtant non moins tragiques . Paul Haggis s’est donc intéressé au comportement des soldats une fois de retour du front : leur comportement est anormal et déséquilibré, inhumain (ou justement trop humain ?) et animal. La guerre , les horreurs dont ils ont été témoins et parfois les auteurs les ont déshumanisés….ou peut-être l’inverse , c’est selon…  Ils ont le droit quasi divin de droit et de mort, ce droit qui n’appartenait auparavant qu’à ces fictions qu’il regardait probablement avec désinvolture, comme celles d’un ailleurs, d’une illusion impossibles, bref comme une fiction d’où la difficulté pour la fiction de s’emparer de ce qui apparaît déjà comme fictif. Ils ont perdu leurs repères et toute notion de normalité. Elah fut ainsi, selon la bible, le théâtre de l’affrontement de David et Goliath. Le titre évoque ainsi les suites tragiques d’une guerre qui semble perdue d’avance : le traumatisme des soldats de retour à la vie civile. Paul Haggis explique ainsi le titre : « Saül envoya David dans la vallée d’Elah avec seulement cinq pierres pour affronter Golath. Je pose la question : Qui oserait cela aujourd’hui ? Qui demanderait à un enfant de se battre contre un géant ? Envoyer des jeunes hommes et des jeunes femmes faire la guerre engage notre responsabilité collective ».

    Si le dessein et le propos sont louables,  le film est selon moi néanmoins raté (mais cela n’engage que moi, le film a été longuement ovationné lors de son projection en avant-première au CID, voir vidéos ci-dessous) pour les raisons évoquées ci-dessus (l’impossibilité pour Paul Haggis de contenir son émotion et de produire un film « ordonné ») mais aussi parce que certaines situations sont totalement improbables recréant la distance de l’écran de télévision, notamment parce que les personnages secondaires sont caricaturés : ainsi va-t-il de l’épouse et mère évidemment éplorée (Susan Sarandon) mais aussi de la relation entre le père du jeune soldat et l’officier de police (Charlize Theron, remarquable néanmoins) : comment croire qu’on laisse un père ainsi s’immiscer dans une enquête en cours, tout ancien militaire qu’il soit ? Comment peut-on trouver crédible que l’officier de police l’invite chez lui à bavarder autour d’un verre, à raconter une histoire à l’enfant de l’officier de police (un fils évidemment, l’histoire de David contre Goliath évidemment aussi) etc ? Premier des 7 films qui vont sortir prochainement concernant la guerre en Irak, l’intérêt film est donc son sujet davantage que le traitement de celui-ci. Reste l’image finale : celle d’un drapeau américain déchiquetée flottant dans l’air. Celle d’une Amérique blessée, coupable et victime, mais oui, blessée en tout cas, qui continue à se battre, aveugle ou aveuglée, malgré les stigmates de la guerre. Le combat de David contre Goliath. Mais ce n’est pas la vallée d’Elah.  Mais ce ne sont pas que des images, juste que des images, surtout atroces chaque soir, entre le potage et le plat de résistance. C’est l’Irak. Un combat  jusqu’à quand et jusqu’où… ?

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     « Avec Grace is gone », en compétition officielle, le parti pris de James C. Strouse est tout autre : pour émouvoir le spectateur, pour qu’il se sente concerné, pour qu’il considère à quel point ce conflit et réel et à quel point il est   là aussi avec des implications ici et maintenant, il filme l’impossibilité pour un père d’avouer à ses filles la vérité : leur mère, militaire, a été tuée en Irak. Si le public est forcément ému à cette histoire à laquelle chacun peut s’identifier  (et par cet aspect c’est une réussite) James C .Strouse, ne nous épargne aucun effet susceptible de nous émouvoir : musique outrancière, gros plans sur les larmes… Reste un film touchant à défaut d’être marquant et  novateur.

    Il ne faudrait néanmoins  pas que la guerre en Irak devienne une fausse bonne raison, un prétexte fallacieux pour émouvoir le spectateur. Le propos perdrait alors de sa force et de l’écho : il en a tant besoin…

    A suivre sur « In the mood dor Deauville » : « Factory girl »,   et la critique du premier film de Ben Affleck en tant que réalisateur (photo ci-dessous),  en avant-première mondiale «  Gone, baby gone »… et toute l’actualité du festival.

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    Sandra.M
  • « L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford » : projection et conférence de presse du sublime western psychologique de Andrew Dominik

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    La conférence de presse

    L’assassinat de Jessie James par le lâche Robert Ford. Voilà qui résonne comme le titre d’un film de série B. Voilà qui est tout sauf un film de série B. Un film majeur, sublime, singulier, qui m’a enthousiasmée et captivée comme rarement je l’ai été cette année au cinéma. Mais avant d’en revenir au film et à sa projection :  petit flash back sur la conférence de presse qui s’est déroulée auparavant, du moins est-ce ainsi qu’on appelle ce curieux rituel  qui la veille avait eu des allures d’empoignade qui cet après-midi avait des airs d’évènement. L’atmosphère est électrique dans la foule des journalistes, tous médias prestigieux qu’ils représentent, certains s’étant vus refusés la veille l’accès à la conférence pour «  Michael Clayton ». Le sésame indispensable  est apparemment cette fois gris. La hiérarchie festivalière qui ignore toute démocratie (la démocratie s’arrêterait-elle à l’entrée d’une salle de presse ?) est parfois obscure.  Nous entrons par quatre.   J’entre. Un garde du corps, épuisé, nous toise d’un regard méprisant. Les CRS entourent la salle de conférence. Allons-nous voir un lion en cage ? Nous voilà en tout cas enfermés avec lui dans le zoo. Un lion traqué plutôt. Après la décontraction et le professionnalisme de Michael Douglas, les excès d’enthousiasme du  non moins charismatique George Clooney, Brad Pitt est visiblement tendu, sur la défensive, (on le serait à moins…) distribuant ses sourires avec parcimonie. Exténué sans doute, la traque a paraît-il commencé dès le début de l’après-midi, dès l’aéroport, puis à l’hôtel Royal. Ne jamais baisser la garde. Comme Jessie James. Véritable métaphore de sa propre existence. Brad Pitt est parfois craint parce qu’admiré. Jessie James est admiré parce que craint. Mais leurs célébrités, certes si dissemblables dans leurs causes, les enferment dans une pareille solitude, méfiance, les condamne à être constamment aux aguets, à l’affût d’un regard perfide, d’une attaque imprévue, à être coupés de la vie. Ils sont deux victimes de personnes aspirant à la célébrité « sans savoir pourquoi, croyant qu’ils vont ainsi devenir de meilleurs humains » ajoute Brad Pitt. Ils provoquent tous deux des bagarres d’un genre certes différent, l’un entre des vautours d’un genre nouveau (à l’aéroport, donc), l’autre entre ceux qui veulent sa tête, d’une autre manière ( dans des plaines gigantesques).  Deux êtres, finalement et évidemment humains, dont on a voulu faire des légendes.  Et la même lassitude, alors compréhensible, semble s’être emparée d’eux. La conférence de presse débute par l’évocation de la complexité du film, à l’image des films des années 1970 qui « prenaient leur temps ». La première version faisait ainsi 4H30. Celle-ci fait 2H35. Rassurez-vous : vous ne les verrez pas passer.  Mais cette similitude entre sa propre existence et le personnage de Jessie James n’est certainement pas la seule raison pour laquelle Brad Pitt a choisi de produire ce film sur le célèbre hors-la-loi et de l’incarner.

    A une question sur « L’homme qui tua Liberty Valance » de John Ford, Andrew Dominik avoue qu’il ne l’a pas vu et Brad Pitt répond que lui l’a vu mais que, contrairement au film de Ford, celui d’Andrew Dominik, raconte davantage la véritable histoire de Jesse James  que la légende. Brad Pitt  précise que lorsqu’il choisit de s’investir dans un projet, il ne réfléchit évidemment pas pour savoir si le film aura du succès ou non. Ce qui compte surtout pour lui c’est « l’histoire et les gens qui travaillent sur un projet ». Il évoque aussi sa société de production « Plan B », dont il avoue que le nom n’est pas trop inspiré (inspiré par son prénom et celui de l’autre cofondateur qui s’appelait également Brad) parce que souvent il voyait des films qui n’aboutissaient pas comme il l’aurait souhaité.  A Casey Affleck, un journaliste demande s’il considère davantage son personnage comme un traitre ou une victime. Casey Affleck répond qu’il est « les deux et bien d’autres choses ». L’intérêt du film et leur implication dans celui-ci résulte selon eux avant tout de  son absence de manichéisme. Les films projetés depuis le début du festival ( à l’exception du film en compétition ce matin « For your consideration » qui a tenté de dire maladroitement ce que Marc Fitoussi a exprimé si justement avec « La vie d’artistes » mais revenons à  nos moutons, lions) dénotent d’ailleurs  une exigence scénaristique, une complexité, bien loin des standards caricaturaux hollywoodiens. Quelqu’un demande à Casey Affleck si c’est un avantage ou un inconvénient d’être le frère de Ben Affleck.  Il répond, visiblement agacé, que cela permet qu’on lui pose de telles questions… Probablement pour la énième fois. Puis, il répond avec humour qu’il a pu « le jeter au requin » et voir avant d’y être lui-même jeté, l’effet que cela produit. Pour l’équipe, ce film est un conte de fée, ce que reflètent les images floues et donc tordues de la réalité, comme vues par le prisme  d’un daguerréotype.  La conférence de presse s’achève et en entendant ces questions relativement banales, je ne me doute pas encore que je vais voir ce film inoubliable, captivant  et si novateur. Nous sommes enfermés dans la salle de conférence quelques minutes avant de pouvoir sortir pour que le public ne s’y engouffre pas et que Brad Pitt puisse repartir tranquillement pour se réfugier, se reposer loin des traqueurs carnassiers.

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    La projection au CID : un western psychologique

    D’abord il est difficile de définir ce film qui reprend certes les codes du western mais qui les détourne majestueusement. Tout comme le titre nous donne une fausse piste. Evidemment il s’agit bien de l’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford. Mais au final, peut-on parler d’assassinat ? Ou d’une bête traquée qui, lasse ou provocante, défie la mort ? Peut-on parler de lâcheté à propos de Robert Ford ? Ce titre, finalement très brillant et loin d’être anodin, évacue d’emblée ce que nous savons déjà parce que l’intérêt est ailleurs. Et si ce film renouvelle le genre, c’est parce qu’il instille la psychologie, aux antipodes du manichéisme habituellement érigé en principe du western.  Les héros sont aussi vulnérables.  Ils ne sont pas invincibles. C’est en effet un duel psychologique palpitant. Une lutte entre deux hommes. Une lutte interne pour chacun d’eux aussi. Robert Ford partagé entre sa vénération pour Jesse James et son désir de gloire de cet homme érigé en héros qu’il vénère autant qu’il désirerait prendre sa place.  Entre l’adoration et la haine.  Entre l’innocence, l’arrogance et  l’ambition. Finalement si proches et peut-être si indissociables. Qui peut mieux haïr que celui qui a le plus adulé. La passion est versatile dans ses excès. Jesse James  est en proie  à ses démons. Robert Ford idolâtre Jesse James. Jesse James lui demande un jour s’il veut « être lui » ou « être comme lui ». La passion, elle aussi, elle surtout,  a des raisons que la raison ne connaît pas.

    Quelques plans font songer à « La prisonnière du désert » et pourtant ce film ne ressemble à aucun autre. La course des nuages que le réalisateur filme à l’envie et par lequel débute le film nous fait d’abord craindre un film caricatural. Il annonce simplement la poésie de ce film imprégné d’une lumière crépusculaire. Les interprétations parfaites et même impressionnante de Brad Pitt et Casey Affleck ajoutent à l’intensité de ce film magistral. Notre respiration est suspendue. Tout peut basculer d’un instant à l’autre. Le doute s’immisce dans les esprits. Le lion peut rugir à tout instant. Un regard qui se brouille. Une agitation inhabituelle. Rien ne lui échappe. C’est d’une intensité hitchcockienne. Voilà, c’est un western hitchcockien, un western d’auteur. Rien n’est superflu.

    Ce film est l’histoire d’une légende qu’en interprète une autre. Un film d’une grande modernité qui renouvelle le genre. Un western qui s’appréhende comme un thriller psychologique. Une œuvre sombrement poétique et mélancolique, lyrique. Un voyage dans des âmes tourmentées et complexes. Un grand film d’une rare richesse psychologique et d’une grande beauté formelle. Qui nous parle d’un monde qui a fait d’un criminel un héros. Qui nous parle aussi du nôtre. Qui fabrique des légendes.  Des lions en cage, celle de leur âme, celle que leur fabriquent ceux qui les traquent, impitoyablement, inlassablement. Un conte de fée des temps modernes. J’y reviendrai avec le recul et le temps nécessaires pour vous en parler parce que ces quelques lignes sont trop courtes et réductrices pour évoquer ce film unique qui me donne finalement l’impression d’avoir accompagné la course des nuages dans leur voyage sombrement poétique d’une beauté et d’une profondeur indicibles  et tellement magique.

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    Le festival  a 33 ans. C'est une renaissance. Il a connu une effervescence comme je n'en avais pas vu ici depuis ses 25 ans. Voici quelques vidéos (pardon pour la qualité des images filmées avec un appareil photo...) qui vous permettront de juger par vous-mêmes...









    Sandra.M